Déplacer un rhinocéros, mode d'emploi
Si vous ne connaissez pas un mot, surlignez-le avec votre souris et cliquez sur “Translate” pour le traduire dans la langue de votre choix.
Déplacer un rhinocéros, mode d'emploi.
Nakuru (AFP) - A peine touchée par une seringue anesthésiante, la femelle rhinocéros, affolée, court se réfugier dans un bois, fuyant l'hélicoptère volant en rase-motte qui tentait de l'en empêcher. L'animal, qui devait être transféré d'un parc à un autre au Kenya, a gagné face aux humains.
Quelques minutes plus tard, plusieurs 4X4 de rangers sondent des bosquets touffus pour la retrouver - une végétation si dense qu'elle rend impossible le passage du camion-grue censé la transporter. Décision est alors prise de lui délivrer l'antidote à l'anesthésiant, pour éviter qu'elle ne s'effondre et peut-être s'étouffe.
La jeune femelle restera bien là où elle est née.
"Le rhinocéros est l'animal le plus difficile à relocaliser", affirme Taru Sheldrick, qui pilotait l'hélicoptère mobilisé samedi dans le parc national de Nakuru (nord-ouest), oasis de verdure entourant un lac d'un bleu profond. "Même si vous les piquez dans une plaine ouverte, ils courent se réfugier dans des buissons".
"Quand vous devez anesthésier un rhinocéros, vous ressentez un peu de peur. Parce que c'est une espèce en danger. Chaque animal est tellement important !", poursuit-il.
Le mammifère, qui peut peser jusqu'à deux tonnes, proliférait autrefois en Afrique subsaharienne. Mais il a d'abord souffert de la chasse par les colons européens, puis du braconnage à grande échelle, qui l'a porté au bord de l'extinction.
Selon la Fondation internationale du rhinocéros (IRF), il en reste environ 28.000 dans le monde, dont près de 24.000 en Afrique. Plus de 2.000 d'entre eux vivent au Kenya.
Mais l'animal se reproduit moins si trop de ses congénères vivent au même endroit, selon le Kenya wildlife service (KWS), l'agence qui gère la faune et les parcs nationaux du pays. D'où la nécessité de déplacer certains individus, et pour ce faire de leur administrer des tranquillisants.
Or les rhinocéros "sont vulnérables aux anesthésiants", car ils ralentissent leur respiration, font augmenter leur température corporelle, et modifient leur rythme cardiaque, ce qui peut les tuer, explique à l'AFP le Dr Dominic Mijele, du KWS.
Une course contre la montre s'enclenche donc dès qu'un vétérinaire, à bord d'un hélicoptère, leur administre ce produit à l'aide d'un fusil hypodermique.
Cinq à sept minutes après l'injection, le rhinocéros commence à en ressentir les effets. Puis il s'effondre, comme l'a constaté l'AFP samedi à Nakuru : après la fuite de la première femelle rhinocéros, trois rhinocéros noirs ont pu être anesthésiés.
Une équipe de secours arrive sur place dans les deux minutes suivantes, dans un ballet impeccablement maîtrisé. Une douzaine de soignants entourent les animaux, qui sont aspergés d'eau - pour refroidir leur température -, retournés - pour que leur respiration ne se bloque pas -, placés sous oxygène, tandis que leurs paramètres vitaux sont contrôlés.
Au même moment, de nombreux autres rangers les sanglent à une corde, qui, traversant la cage de transport, est accrochée au pare-buffle d'une jeep.
Quinze minutes après l'arrivée des secours, l'antidote est administré. L'animal se relève alors d'un bloc, pour être poussé instantanément dans la cage, qu'une grue dépose quelques minutes plus tard sur le plateau d'un camion.
Le Dr Mijele vante un savoir kényan inégalé. "Nous sommes les numéros 1 au monde" pour les relocalisations de rhinocéros, affirme-t-il.
Accédez à l'intégralité de l'article, choisissez un abonnement

Des vétérinaires kényans et des rangers se précipitent pour aider une femelle rhinocéros sédatée à des fins de relocalisation, dans le parc national de Nakuru, au Kenya, le 7 juin 2025 - Tony KARUMBA (AFP)